« Si Sarkozy continue, il aura la défaite et le déshonneur »
INTERVIEW – Lynda Asmani, conseillère Nouveau Centre de Paris et ex-UMP, lance un « appel » aux élus de droite pour « mettre en garde » Nicolas Sarkozy sur la dérive très droitière de sa campagne. « Consternée » par ses déclarations de l’entre-deux-tours, elle craint la « défaite et le déshonneur ».
Conseillère Nouveau Centre de Paris, ex-UMP, Lynda Asmani se définit comme une « femme de droite, libérale », mais explique au JDD.fr être « consternée » par la campagne de second tour de Nicolas Sarkozy. Après avoir soutenu François Bayrou pour le premier tour, elle a, tout comme les autres élus centristes du Conseil de Paris, pris position en faveur de Nicolas Sarkozy. Désormais, cette proche du sénateur Jean Arthuis, par ailleurs candidate dans la 2e circonscription face à l’UMP Pierre Lellouche, lance un « appel » au candidat pour qu’il infléchisse sa campagne dans les derniers jours et attend vendredi avant de décider ce qu’elle fera dans l’isoloir le 6 mai. Elle exprime ses « doutes » au JDD.fr.
La campagne de second tour de Nicolas Sarkozy vous gêne-t-elle?
En ce qui me concerne – mais je parle au nom de plusieurs personnes, des élus, qui sont objectivement à droite et qui ont toujours été les alliés de la droite -, je m’interroge et m’inquiète des propos tenus la semaine dernière par Nicolas Sarkozy et sur lesquels il ne semble pas prêt de revenir. Je lance un appel à toutes les droites (libérale, centriste, humaniste, européenne) à mettre en garde le président de la République en disant que s’il continue, il aura la défaite et le déshonneur. Je parle pour tous ceux qui n’ont peut-être pas osé parler jusqu’à aujourd’hui et leur demande de se mobiliser. Nicolas Sarkozy doit donner des signes aux centristes et pas aux électeurs de Marine Le Pen. Il faut dire à nos concitoyens que la droite et le centre, ce n’est pas l’extrême droite et qu’il y aura toujours des gens responsables qui seront vigilants. Si Nicolas Sarkozy continue sur le même ton, il fera perdre nos idées parce qu’il ne les aura plus défendues.
Quels propos visez-vous?
La présomption de légitime défense des policiers par exemple. Si cette proposition avait été le fruit d’une longue réflexion, de débats pendant des mois, admettons. Mais là, ça arrive comme un cheveu sur la soupe alors que c’est une idée de Marine Le Pen, qui elle-même se félicite d’une victoire idéologique, ça pose un vrai problème de fond.
Le 6 mai, qu’allez-vous voter?
Je lance un appel et, vendredi, je reprendrai la parole. On ne peut pas le condamner alors qu’il est peut-être acculé. Chacun peut faire des erreurs. Mais il ne faut pas persévérer, surtout quand ses alliés, ses amis lui disent. Nous risquons de perdre sur des thèmes qui ne sont pas ceux de la droite. Quand la droite n’est plus elle-même, c’est l’extrême-droite qui prend le pas.
Vous trouvez que Nicolas Sarkozy mène une campagne d’extrême droite?
Je regrette que cette campagne n’ait pas été faite sur la société de l’intelligence, l’innovation, la recherche, l’investissement, qui sont les vrais problèmes des Français. Ce n’est pas la viande halal! C’était abaisser le débat politique que de répondre systématiquement à tous les appels de Marine Le Pen. C’est elle qui a créé le débat et on ne l’a pas recentré. Quand la campagne traitait de vrais sujets de droite, comme l’Europe, on l’a fait sur des thèses de peur, en disant qu’il fallait fermer les frontières. Ce n’est pas ma culture politique : je viens de l’ancienne UDF, je suis libérale. Je suis consternée d’avoir entendu des choses qui n’appartiennent pas aux valeurs de la droite et du centre. Nous nous sommes trompés de campagne. Conclusion, comme les Français préfèrent l’original à la copie, ils ont mis Marine Le Pen en position d’arbitre du second tour. Je ne vois pas aujourd’hui comment Nicolas Sarkozy peut gagner s’il n’envoie pas un message à ses alliés.
Source : http://www.lejdd.fr/Election-presidentielle-2012/Actualite/Si-Sarkozy-continue-il-aura-la-defaite-et-le-deshonneur-507137/?from=headlines